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Entertainment

2023 WINTER

Le ppong se renouvelle grâce au DJ 250

Connu sous le nom de 250, un producteur, musicien et disc-jockey coréen a entrepris de donner une nouvelle vie au ppongjjak, cette variante mineure et parfois raillée d’un genre typique et déjà centenaire appelé trot. L’année dernière, il a notamment enregistré l’album Ppong, dont les sonorités originales ont été appréciées tant en Corée qu’à l’étranger, mais les créations qu’il réalise pour d’autres artistes remportent un égal succès.

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Artiste polyvalent par ses activités de chanteur, DJ, auteur-compositeur et producteur, 250 se distingue particulièrement sur la scène de la chanson populaire coréenne par son style mariant électro et ppongjjak, ce genre plus ancien de musique pop soul.
© Beasts And Natives Alike

Pour qui découvre les nouilles de style asiatique dites ramyeon, ou ramen, il ne suffit évidemment pas de les jeter dans l’eau chaude avec les légumes lyophilisés qui les accompagnent, car il convient d’ajouter au bouillon une bonne dose de cet ingrédient indispensable au goût de la préparation qu’est le piment rouge en poudre.

Par son succès fulgurant, le disc-jockey 250 est un peu à la musique ce que le buldak bokkeum myeon est à la cuisine par sa saveur piquante sans pareille : tout aussi remarquable à la scène qu’à la ville il figure parmi les références incontournables de la pop coréenne actuelle. Dénommé Lee Ho-hyung à l’état-civil et âgé de quarante et un ans, il mène son activité de DJ en parallèle avec celles de producteur et de compositeur de musique électronique.

Dans la version actualisée du ppongjjak, qui résulte d’une fusion innovante du trot avec le hip-hop et l’EDM, il occupe une position d’avant-garde. En témoigne le caractère révolutionnaire de son premier album Ppong, pour lequel il s’est vu décerner un Korean Music Award (KMA) en mars dernier, lors de la vingtième édition de la cérémonie du même nom qui met l’accent sur les qualités artistiques plus que sur la notoriété. À cette occasion, un jury composé de critiques et de journalistes lui a remis les quatre distinctions de Musicien de l’année, d’Album de l’année, de Meilleur album de musique électronique et de Meilleure chanson de musique électronique pour son titre Bang Bus.

Dans le domaine de la production, il a à son actif d’avoir conduit au succès le groupe de K-pop NewJeans, qui compte aujourd’hui parmi les plus grands. En 2022, l’irruption de cette formation composée de cinq artistes a marqué un total renouveau du style des girls bands, ce qui lui a valu de faire l’objet d’un nombre record de nominations et de remporter trois trophées aux KMA 2023, à savoir ceux de la Révélation de l’année, du Meilleur album de K-Pop pour New Jeans et de la Meilleure chanson de K-Pop pour Attention. Le DJ 250 allait aussi lancer la carrière de groupes aussi prestigieux que BTS, NCT 127 et ITZY.


Quand naît l’inspiration

C’est lors d’un voyage à Séoul, effectué voilà dix ans, que 250 allait découvrir le ppongjjak à la faveur d’un arrêt sur une aire d’autoroute où, séduit par ce genre, il fera aussitôt l’acquisition d’une cassette musicale. Par la suite, les expériences ludiques de remixage auxquelles il se livrera sur ces airs pour la création de ses sets de DJ le conduira à entreprendre une démarche plus sérieuse d’adaptation du trot à l’EDM.

Inspiré de la célèbre danse de salon appelée foxtrot, le trot coréen se distingue par son rythme et les accents tantôt tristes et romantiques, tantôt joyeux de ses paroles empreintes d’émotion, à l’image des états d’âme changeants de son public. Quoiqu’il constitue une forme traditionnelle de la musique populaire que connaissent les Coréens de tous âges, il était il y a encore peu tombé dans l’oubli, car jugé désuet et sans grand intérêt.

Quant au ppongjjak, son nom reprend de manière cocasse l’onomatopée coréenne kungjjak imitant le son d’un tambour, outre que le mot ppong possède une connotation de frivolité expliquant son usage peu fréquent dans le langage quotidien jusqu’en 1986, où un film pour adultes allait le rendre plus répandu, la drogue constituant son autre acception en argot. « C’est drôle, c’est bizarre, c’est sombre... Cette syllabe " ppong " exprime et symbolise à elle seule ces émotions complexes si différentes les unes des autres », explique 250.

Je retrouve ce dernier dans son studio de Yongsan, fameux quartier du centre de Séoul et lieu de prédilection des expatriés, mais aussi de la jeunesse coréenne et des touristes qu’il attire par son atmosphère rétro. Avec son sérieux habituel, il évoque l’instant décisif de sa carrière, cet « Euréka! » qui a été le sien à l’issue de son travail expérimental sur différents formats compatibles avec le trot. C’est en voyant le film Rear Window, de Hitchcock, ce classique à suspense de 1954 où un homme en fauteuil roulant épie son voisinage, qu’une inspiration musicale lui est venue.

Après l’avoir visionné, il s’est mis en devoir de composer une mélodie en reprenant le titre du film. « J’avais l’impression que la musique ppong et la musique non-ppong se regardaient l’une l’autre à travers la vitre transparente d’une fenêtre », se souvient 250. Une fenêtre à la dimension métaphysique qui s’avère indispensable à la bonne compréhension de son univers sonore.

 

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La pièce de théâtre 250 tient son titre du pseudonyme que s’est donné Lee Ho-hyeong parce que son véritable nom se prononce comme les chiffres 2, 5, 0, à savoir « ee-oh-yeong », que le public modifie toutefois souvent en leur préférant « ee-oh-gong ».
© CENTRE SEJONG DES ARTS DU SPECTACLE

Le cheminement musical
Après avoir suivi un cursus d’études spécialisé en musique de film à l’Université Hanseo, 250 a entamé sa carrière en composant pour des séries télévisées avant de travailler comme disc-jockey au Cakeshop, une boîte de nuit de Séoul qui se situe dans le quartier d’Itaewon et où se retrouvent les amateurs de musique électro. C’est à cette même époque que l’achat d’une cassette de trot allait orienter la suite de son parcours musical.

Dans le monde de la nuit, où ne cessait d’enfler la rumeur portant sur ce DJ aux choix musicaux singuliers, le jeune homme n’allait pas tarder à se faire un nom, la société SM Entertainment faisant bientôt appel à lui pour le remixage de morceaux de K-pop très connus. Puis il allait passer à l’étape supérieure en produisant des titres tels qu’Everywhere et Flight pour le célèbre rappeur E SENS.

En 2018, 250 réalisera la production d’une série de films documentaires à petit budget intitulée In Search of Ppong dont le succès sur la scène musicale traduisait une reconnaissance implicite de son double talent pour l’humour et la production musicale.

Respectivement enregistrés en 2018 et 2021, ses singles Rear Window et Bang Bus allaient être accueillis avec moyennement d’enthousiasme, contrairement à son premier album Ppong sorti en mars 2022, qui allait d’emblée conquérir le public comme la critique par son originalité. La composition de ses titres s’était étalée sur plusieurs années au cours desquelles 250 s’était exclusivement consacré au trot, recherchant l’inspiration auprès d’interprètes renommés de ce genre pour créer des sonorités évocatrices des thèmes de la guerre, de la partition, de la détresse et de la nostalgie qui caractérisent l’histoire de la Corée au XXe siècle.

 

Une image changeante

Aux yeux de 250, le ppongjjak représente un élément fondamental de la culture coréenne, à l’instar du hip-hop new-yorkais ou du funk des favelas à Rio de Janeiro. « Un charme particulier se dégage du hip-hop quand la musique, qui vient d’un minimum d’instruments, est associée à de petits extraits de morceaux interprétés par de grands musiciens ou par un orchestre symphonique. On retrouve ce même attrait dans le ppongjjak », estime-t-il.

En ayant la révélation du ppongjjak, 250 a pris conscience de ses points communs avec la cuisine coréenne. « Les Coréens ont un faible pour les plats épicés tels que le ragoût de kimchi ou le jeongol. Après avoir passé une semaine en Belgique, mon manager et moi nous sommes précipités dans le restaurant de ragoût de kimchi le plus proche. Le ppongjjak fait vibrer une corde sensible chez les Coréens, tout comme ils sont naturellement portés sur la cuisine épicée plutôt que peu relevée. Il me plaît beaucoup par son alliance d’accents mélancoliques avec une énergie presque naïve », déclare 250.

Sa conception du ppong n’a cessé d’évoluer avec les années. « Le ppongjjak, c’est un peu comme cet assaisonnement des ramyeon que tous les Coréens connaissent. Si vous faites mijoter un ragoût de kimchi et que vous trouvez qu’il y manque quelque chose, vous ajoutez un peu de cet assaisonnement, n’est-ce pas? Il n’est peut-être pas raffiné, mais il donne ce goût fort qui reste en bouche et vous revigore. C’est la dernière touche qu’il faut apporter, ce quelque chose qui manque ».

 

Le retour du rétro

250 connaît toujours plus de succès avec l’apparition d’une tendance à la nostalgie qui remet au goût du jour vêtements, équipements et musique jusque-là démodés, dont ce genre du trot qui suscite actuellement un regain d’intérêt. C’est l’alliance de cette tendance rétro avec des sonorités plus actuelles qui, en créant une impression à la fois familière et étrange, séduit particulièrement un public d’adolescents et de jeunes adultes admirateurs des compositions de 250, alors qu’ils sont nés bien après le tournant de ce siècle où le trot faisait partie du quotidien en Corée.

« Vivant à une époque placée sous le signe de l’ordre et de l’hygiène, ils délaissent les marches bien droites du centre-ville pour s’aventurer sur les escaliers tortueux des vieilles maisons de banlieue. Depuis quelque temps, la musique country arrive en bonne position au classement du Billboard, ce que l’on peut mettre en parallèle avec le succès croissant du trot au hit-parade coréen ces dernières années », explique 250. Son goût du rétro ne se limite pas à la musique et il se dit notamment admiratif des scènes d’action un peu excessives que comportent les films hongkongais des années 70 et 80 comme les premiers tournés par Jackie Chan, dont The Fearless Hyena de 1979.

« J’aimerais pouvoir un jour composer pour le cinéma. Les films qui accordent beaucoup de place à la musique me plaisent particulièrement, notammen A Quiet Place (2018), ainsi que ceux qui possèdent une certaine envergure à l’instar d’Inception (2010), ou ceux qu’a rendus célèbres leur bande originale, comme l’a fait la musique du regretté Ennio Morricone ».

C’est à la dernière édition du Festival international du film fantastique de Bucheon que le documentaire intitulé In Search of Ppong réalisé par 250 a été projeté pour la première fois dans le cadre d’une manifestation consacrée au cinéma.

« Je ne m’inspire d’aucune figure en particulier, mais je suis ouvert à la possibilité d’un travail expérimental dans le domaine de la musique, comme l’a fait le producteur Quincy Jones ou l’artiste Ryuichi Sakamoto qui nous a quittés cette année ».

Quant au prochain album qu’il projette d’enregistrer, il pense lui donner pour titre America. « Après m’être intéressé au ppongjjak coréen, je me dis qu’il est peut-être temps de me pencher sur la musique américaine. Ce pourrait être en composant un album empreint de cette nostalgie de l’Amérique qui m’a fait rêver et des sonorités américaines qui m’ont marqué à l’époque de mes études. » Quel que soit le nouveau cap qu’il donnera à ses créations, il ne manquera pas de leur conférer ce caractère qui fait leur originalité.

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À la vingtième édition des Korean Music Awards, 250 a été quatre fois récompensé pour son premier album intitulé Ppong, pour la plus grande satisfaction de l’artiste, puisque l’obtention d’une distinction dans les catégories du Meilleur album de musique électronique et de la Meilleure chanson de musique électronique consacre son appartenance à ce genre particulier.
© Beasts And Natives Alike

Lim Hee-yunCritique musical

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